Essai Bentley Continental Supersports: collector!

Industrie Bernard VERSTRAETE

710 ch, et plus de 1000 Nm de couple, pour 710 exemplaires!

Au Salon de Francfort, Bentley a dévoilé la génération 2018 de la Continental GT, qui sera vraiment une nouveauté puisqu’elle ne sera plus basée sur le châssis de la VW Phaeton, mais sur la plateforme MSB inaugurée sur la Porsche Panamera. Mais avant cela, pour marquer d’un grand coup la fin de la carrière de la Continental GT actuelle, qui s’est vendue à 66.000 exemplaires en 15 ans, Bentley propose une dernière version Supersports, aussi extrême qu’exclusive.
             Par Bernard Verstraete; photos MSD/Jean-François Miroir

L’image de grosse limousine fastueuse pour lord britannique qui était autrefois associée à Bentley appartient clairement au passé. La Continental GT laisse aujourd’hui bien peu de passants indifférents. Elle suscite manifestement l’admiration. Pourtant, la teinte ‘Moroccan Blue’ de l’exemplaire mis à notre disposition n’était pas spécialement tape à l’œil et la personnalisation de cette version Supersports se fait dans la subtilité.

Les prises d’air dans le capot sont inédites. Celles des ailes avant n’ont été vues que sur la série spéciale Speed Black Edition l’an dernier. Le bouclier est spécifique. Remarquez le détail dans la découpe des ouïes!

Luxueuse, cette Bentley Continental l’est plus encore que les autres. Extérieurement, elle se distingue surtout par un bouclier avant au design exclusif, aux ouvertures tout en largeur, pour renforcer l’impression d’assise. A l’arrière, ce sont les sorties d’échappement très plates qui produisent cet effet.

Le “rectangle” arrière, nommé “fer à cheval” chez Bentley, marque la largeur de la Continental GT.
Des jantes exclusives de de 21″ et les plus grands disques de freins du marché.

Les impressionnantes roues de 21 pouces, avec des jantes exclusives en alliage forgé (disponibles en finition noir brillant), participent aussi au caractère de cette Continental Supersports. Tout comme les multiples inserts en carbone qu’on trouve au niveau des prises d’air dans le capot et dans les ailes avant, dans les boucliers avant et arrière, sur les coques de rétroviseurs, sur les “jupes” latérales et sur l’aileron. Bentley pousse même le luxe jusqu’à offrir (en option) la coiffe de moteur en fibre de carbone à finition luisante!


Souci du détail

Luxe inimitable et volupté caractérisent l’intérieur de toute Bentley. Le niveau est encore relevé sur cette version Supersports avec tout un éventail de détails esthétiques.

Luxe et confort dominent dans cet habitacle cossu et bien agencé.

Un schéma tricolore a été spécialement créé pour elle. Les sièges et les panneaux de portes, habillés d’une superbe combinaison de cuir et d’alcantara, arborent un très classieux capitonnage en losanges. Sur la planche de bord, un nouveau placage à damier s’accorde bien à l’aspect rétro des poussoirs des ouïes d’aération. Le souci du détail impressionne avec le levier de vitesses en alu très travaillé, l’étui à lunettes siglé intégré à la console centrale, le pédalier en alu avec inserts caoutchoutés et même les extrémités des rails de sièges recouverts d’aluminium!

L’exploit de Bentley reste de parvenir à offrir 4 “vrais” sièges sur la surface d’une 2 places.

On se sent immédiatement à l’aise dans cet habitacle digne d’un salon anglais. La position de conduite est parfaite. Vous trouverez rapidement le mode d’emploi de tous les instruments et de tous les boutons. Des molettes et des commodos qu’on ne se lasse pas d’effleurer tant leur contact est agréable. Tout n’est pas parfait pour autant… Les ‘paddles’ derrière le volant sont placées un rien trop haut à notre goût, et le levier de clignoteurs trop bas. Le fonctionnement du système multimedia et surtout l’affichage (avec des traits grossiers) de la navigation ne sont pas à la hauteur de la qualité Bentley. Et la visibilité, limitée vers l’arrière de par le style de la voiture, est entravée vers l’avant par les épais montants A.

Performances bluffantes

Ces petites faiblesses sont toutefois largement gommées par la fantastique mécanique logée sous le capot et par sa sonorité. Cette Continental GT Supersports est en fait la Bentley la plus puissante et la plus rapide jamais homologuée pour la route. La vénérable marque anglaise, devenue membre du groupe Volkswagen depuis 1998, reprend bien entendu le plus gros moteur de la gamme, le W12 qui est constitué par l’accouplement de deux moteurs VW VR6 pour obtenir un 12 cylindres de 6 litres de cylindrée vraiment impressionnant. Par rapport à la version Supersports précédente (de 2009), il gagne 80 ch en puissance et 217 Nm en couple, pour atteindre les chiffres exceptionnels de 710 ch et… 1017 Nm! Inutile de dire que les performances sont époustouflantes, même si la Continental Supersports reste utilisable confortablement au quotidien.

On ne se lasse pas de profiter de la sonorité envoûtante du W12 biturbo et des performances exceptionnelles délivrées par les 710 ch et 1017 Nm de couple.

Pour obtenir ce résultat, Bentley a utilisé les enseignements de la course, notamment en Blancpain GT Series où notre compatriote Maxime Soulet est un des pilotes de pointe de l’équipe M-Sport alignant régulièrement deux voitures. Cette version Supersports reçoit de nouveaux turbocompresseurs, un système de refroidissement d’air de suralimentation repensé et un vilebrequin amélioré notamment par de nouveaux paliers principaux et coussinets de bielle.

Ainsi peaufinée, la Continental GT Supersports accélère de 0 à 100 km/h en 3″5 et peut grimper jusqu’à 336 km/h. Bluffant pour une berline de luxe de 2,3 tonnes!

Les effets de la masse

Excepté dans les courbes serrées, le comportement de la Bentley Continental Supersports est bien plus dynamique que pourrait le laisser penser son allure imposante.

Pour faire passer cette cavalerie sur la route, la Bentley de pointe est dotée d’une transmission intégrale. La boîte de vitesses est une ZF automatique à 8 rapports avec Quickshift, pouvant être commandée séquentiellement par les grandes palettes au volant. Pour obtenir un comportement ludique, la répartition du couple se fait à 40% sur l’avant et 60% sur l’arrière. Mais, à moins de disposer de la piste d’essai de Top Gear, impossible de faire décrocher la GT sur routes ouvertes. Il faut dire qu’elle inaugure un nouveau convertisseur de couple qui agit subtilement sur chaque roue pour contrer tout patinage. Le couple est tellement phénoménal qu’en utilisation dynamique, on sent l’antipatinage entrer rapidement en action; mais ses interventions sont toujours bien calibrées pour ne pas brider inutilement l’impression de puissance.

L’aileron arrière renforce l’appui à haute vitesse.

De là à faire de la Continental GT une ballerine, il y a un pas. Si on a rarement la sensation d’être au volant d’une voiture aussi lourde, on perçoit quand même les effets de la masse quand la route se fait sinueuse. Son comportement devient un peu lourd sur le train avant si on laisse sa tendance naturelle se manifester. Il faut donc prendre les virages en accélération pour profiter du travail des ingénieurs.

Baryton et ténor en duo

Passé le cap du gros coup de gaz inutile au démarrage, la sonorité des 12 cylindres est agréable sans être trop envahissante en utilisation “normale”. Mais on sera souvent tenté d’actionner le mode ‘Sport’ pour profiter non seulement d’un amortissement un peu plus ferme, mais surtout d’une bande son phénoménale, baryton et ténor s’accordant alors dans un duo terriblement envoûtant vous incitant à en remettre et en remettre. Bien plus que les détonations de l’échappement en titane à chaque lever le pied, c’est l’envolée lyrique des 12 cylindres qui enchante les oreilles à en donner des frissons.

Le revers de la médaille est que cette Continental GT est tellement confortable que l’impression de vitesse est largement sous-estimée jusqu’à 160 km/h. Gare aux radars! Mise à part l’inscription en entrée de courbe, la réactivité de la direction est parfaite, tout comme celle de l’accélération. Le freinage est le principal domaine où cette Bentley de feu pourrait faire mieux. Malgré l’adoption de disques en carbone céramique de 42 cm de diamètre (un record), pincés par des étriers à 8 pistons, amener les 2,3 tonnes à l’arrêt n’est pas toujours évident. Surtout après quelques freinages appuyés.

Les manœuvres ne sont pas non plus son point fort, la boîte n’étant pas très rapide dans cet exercice et le fonctionnement des capteurs de recul s’avérant complètement fantaisiste.

Mention “pas mal” en revanche pour la roue de secours temporaire (une normale serait encore mieux mais c’est préférable à un kit de gonflage rarement salutaire) logée sous l’épaisse moquette du coffre volumineux mais un peu limité en hauteur.

Prix de l’exclusivité

Un sens du détail, de la qualité et de la finition exceptionnel.

Les gens de bonne éducation vous diront qu’il est particulièrement vulgaire de parler d’argent en société. Toujours est-il que ce superbe exercice de raffinement technologique a un prix: 272.250 euros en version de base. Et même 304.726 € avec les options et les finitions de notre modèle d’essai! Une fameuse somme pour un volant et quatre roues mais il suffit d’y goûter trois brèves journées pour comprendre que certaines personnes ayant bien réussi dans la vie se laissent tenter par de pareils bijoux. D’autant que cette version Supersports extrême peut être considérée comme un collector. Même si elle a été commercialisée peu de temps avant la présentation (en septembre au Salon de Francfort) de la nouvelle génération de Continental GT, elle restera exclusive puisqu’elle ne sera produite qu’à 710 exemplaires (comme sa puissance) et que la palette de moteurs de la nouvelle GT ne prévoit pas une telle puissance. Notons que cette version Supersports est également disponible sur le cabriolet GTC chargé de faire la liaison avec son remplaçant pas encore annoncé.

La fiche technique

Dimensions: L/l/h: 4,806 / 1,944 / 1,394m. Empattement: 2,746m. Voies av./arr.: 1,625/1,605m.    Poids: 2.280 kg. Volume de chargement: 358 litres.
Moteur: 12 cyl. en W, 48v, 5998cc, biturbo. Puissance maxi: 710 ch à 6000 t/min.
Couple maxi: 1017 Nm de 2050 à 4500 t/min.
Transmission: aux 4 roues, boîte huit rapports automatique avec commande séquentielle.
Suspensions: Av: double triangulation, suspension pneumatique.  Arr: essieu multibras, suspension pneumatique.  Av & arr: correction d’assiette automatisée; barre antiroulis.
Freins: Av/arr.: disques carbone céramique ventilés et perforés 420 / 356 mm.
Roues: jantes 21 x 9.5″; pneus Pirelli PZero 275/35 ZR 21.
Performances: V-Max: 336 km/h. 0-100 km/h: 4″0.
Consommation moyenne: 15,7 l/100 km. Réservoir: 90 litres.
Prix de base: 272.250 € tvac.

La Bentley Continental GT Supersports permet de faire vraiment le plein de sensations.
Plus Moins
+ Finition à nulle autre pareille
+ Confort insoupçonné
+ Mélodie du W12
+ Lignes classieuses
+ Performances époustouflantes
+ Exclusivité
– Objet ostentatoire
– Poids élevé
– Lourdeur du train avant
– Système multimedia dépassé
Une finition exceptionnelle poussée jusqu’au bout des rails de sièges.
Même le pédalier est remarquablement travaillé.